Chapitre 10: La jeune fille aux Boucles d'Or
C'était la nuit. Une nuit de pleine lune, sans nuage pour cacher les étoiles du ciel. Une nuit comme on n'en avait pas l'habitude à Forks. La jeune fille marcha en direction de chez elle. Elle avait un mauvais pressentiment. Quelque chose n'allait pas. Cette nuit était beaucoup trop calme, beaucoup trop parfaite. Ses longs cheveux blonds flottaient dans l'air doux du soir. Elle arriva enfin chez elle, mais s'immobilisa lorsqu'elle reconnut un homme prostré devant sa porte. Elle lui sourit gentiment. Elle avança doucement et découvrit l'ombre de trois autres hommes à coté du premier. Tous lui étaient inconnus. Elle appréhenda en se rapprochant doucement d'eux pour rentrer chez elle. Mais après tout, elle n'avait pas à avoir peur. Son fiancé était là, il empêcherait les trois autres de lui faire du mal. Elle sourit en pensant au terme qu'elle avait utilisé. Fiancé. En effet, elle allait se marier. Qui plus est avec l'un des garçons les plus gentils qu'elle connaissait.
Bien sur, ils n'allaient pas se marier tout de suite, elle était encore au lycée. Il lui restait après tout deux bonnes années avant de pouvoir obtenir son diplôme et de décrocher une place à l'université. Mais leur mariage était prévu depuis longtemps déjà. Depuis leur naissance pour être exacte. Ils ne se voyaient pas régulièrement durant les années de leur croissance, mais ils se savaient quand même liés par les liens sacrés d'un futur mariage entre eux, entre leurs deux familles.
La jolie future mariée se dirigea donc vers sa porte, la peur ayant presque disparu grâce à l'assurance et au soulagement de la présence de son futur mari.
Malheureusement, cette assurance la quitta presque instantanément quand elle fut assez proche pour bien le distinguer dans la nuit. Elle vit alors son sourire sadique, mauvais. Ses yeux luisants et impatients. Enfin elle vit les bouteilles vides qu'il prônait dans chacune de ses mains. Elle se mit alors à frissonner, non pas de froid, mais bel et bien de peur et d'appréhension. Quand elle le vit s'approcher d'elle lentement, tel un prédateur appâtant sa proie, elle ne put s'empêcher d'effectuer un mouvement de recul.
Le jeune homme, qui d'habitude est si classieux, poli et séduisant n'avait plus l'air d'avoir aucune de ces qualités qui faisaient de lui, un homme respectable, respectueux et irréprochable. Cette nuit là, il ressemblait à ce genre d'hommes imbuvables, grotesques, bourrus et grossiers. Il ressemblait à un homme de mauvais rang, un dépravé, un de ces salopards qui traînent dans les bars, complètement ivres et qui vous interpellent en vous sifflant après votre passage ou en vous draguant pitoyablement et piteusement, espérant pouvoir réussir à satisfaire leur besoin masculin. Le jeune homme s'arrêta, puis dévisagea la jeune fille ouvertement avec un regard à la fois pervers et appréciateur, ce qui eut le don de l'apeurer encore plus.
- "Salut beauté." Fit-il de sa voix néfaste et crapuleuse. Elle frémit. La façon dont il s'était exprimé n'avait rien de semblable avec la voix qu'elle lui connaissait.
- "Royce… Que fais-tu ici?" Demanda-t-elle avec fébrilité. Le bougre se mit à rire de manière tonitruante et assourdissante. C'est alors qu'elle sentit son haleine qui avait certainement dû ingurgiter énormément d'alcool pour sentir aussi fortement.
- "Je t'attendais… Chérie." Fit-il avec dédain.
- "Je crois que tu n'es pas dans ton état normal." Dit-elle avec inquiétude en se reculant un peu plus de lui.
- "Au contraire, je me sens parfaitement bien." Il se rapprocha d'elle à une vitesse exubérante, puis se stoppa à quelques millimètres d'elle. Ils étaient tellement proches qu'elle réussit même à avoir l'envie de dégobiller face à son haleine monstrueuse. Il jeta les bouteilles qu'il tenait au sol, sans s'en préoccuper le moins du monde. Puis il posa sa main sur son bras, d'abord avec lenteur, puis une pression plus dure et forte se fit sentir. La belle blonde gémit de la petite douleur qu'elle ressentit, et tenta de se dégager.
- "Royce, lâche-moi, tu me fais mal." Il pressa encore plus et elle se débattit avec plus de force, puis arriva enfin à se dégager de son emprise. Elle ne le voyait pas à cause l'obscurité, mais elle était persuadée qu'elle découvrirait une abominable marque rouge le lendemain matin à l'endroit de son bras où il avait appuyé.
- "Voyez-vous ça!" Rigola l'un des trois autres. "Elle a du chien. Où est-ce que tu l'as choppé celle là Royce?" Sa voix faisait les montagnes russes dans l'intonation, signe qu'il était loin d'être sobre. La femme apeurée observa son fiancé avec crainte. Il lui souriait sadiquement avant de répondre à son interlocuteur.
- "Cette pucelle, je la dois à mes parents." Elle était choquée. Jamais Royce King n'avait parlé d'elle de cette façon.
- "Hé, t'oublieras pas de nous en laisser un peu hein?" Demanda un autre.
- "Non, je la partage." Rit-il perversement. La belle blonde se recula prestement, outrée d'être considérée vulgairement, mais le jeune homme auparavant si beau, se précipita et lui prit cette fois, les poignet avec une force inouïe. La fille poussa un cri aigu, ce qui ne fit qu'accentuer sa prise. Elle essayait de se débattre comme elle l'avait fait la première fois mais l'emprise qu'il avait autour de ses poignets était bien plus considérable.
- "Lâche moi!" Hurla-t-elle vainement. L'homme la tira vers lui avec force et elle se cogna la tête contre son torse en perdant l'équilibre. Il la retint sans la moindre délicatesse tandis qu'elle essaya de s'échapper. Puis soudainement, alors que les trois hommes derrière étaient hilares, il la repoussa violemment, et lui asséna une claque qui la fit tomber à terre, de par sa puissance. La pauvre adolescente était tétanisée, paralysée et n'essayait même pas de se relever. Le prédateur s'avança vers elle à pas lents alors qu'elle reprenait son souffle qui s'était coupé et lui donna un énorme coup de pied en plein dans son ventre, ce qui la fit crier de douleur.
- "Tais-toi salope!" Ordonna-t-il méchamment. Elle pleurait. Les trois autres qui jusqu'ici, n'avaient fait que regarder et apprécier le spectacle, s'approchèrent et deux d'entre eux allèrent se placer derrière elle pour la tenir par les avants bras de chaque coté, de sorte à ce qu'elle n'ait aucun moyen de s'échapper. Elle peinait à se débattre mais c'était peine perdue à cause de leur force et de son affaiblissement.
- "Emmenez-la derrière la maison. On sera plus tranquille." Commanda Royce. Les deux acolytes la traînèrent sans ménagement vers l'arrière de la maison. La jeune fille hurlait de peur, de douleur à cause du râpage avec le sol rocailleux. Une fois arrivés dans le jardin, ils la relâchèrent brusquement. Royce se baissa à sa hauteur et prit son menton dans ses mains. Elle était bouleversée et avait des yeux implorants. Il se mit à sourire dédaigneusement.
- "Je passe en premier."
Ce fut ensuite un véritable enfer. Nous assistions à une farandole de cris, à la fois des hommes qui se faisaient le bien dont-ils avaient besoin au détriment de la pauvre fille innocente et à la fois venant d'elle, à cause de la souffrance, la peur et la supplication.
Chacun à son tour y passait, et chaque fois la fille se sentait mourir de plus en plus, se sentait sombrer à petites doses dans le chaos le plus profond.
Aux toutes premières lueurs de l'aube, les monstres décidèrent qu'ils en avaient fini avec cette sainte, désormais salie pour le restant de ses jours et s'éclipsèrent, telles des ombres de la nuit, créatures des ténèbres épouvantables. Ils la laissèrent là, gisant à terre en tenue d'Ève, souillée de la tête au pied et baignant dans le sang de son innocence dérobée de la pire des manières qui fut.
Elle décida de ne pas bouger, tellement bouleversée, détruite et épuisée. Elle passa la journée à pleurer silencieusement afin que personne, qu'aucun voisin ni passant ne puisse l'entendre ni la repérer. Elle ne désirait pas qu'on la trouve. Elle voulait seulement être oubliée.
Le soir arriva, elle était restée immobile, à moitié sombrant dans l'inconscience tandis que l'autre moitié pleurait jusqu'à l'épuisement. Le froid ne l'avait pas dérangé, elle ne l'avait même pas senti sur sa peau nue. Elle entendit à peine ses parents se diriger vers la maison. Ils avaient été absents tout le weekend et étaient rentrés. Elle les entendit vaguement appeler son prénom après qu'une porte fut déverrouillée, puis entendit des pas dans sa direction. Elle avait les yeux fermés.
Puis elle entendit un cri d'effroi venant de la personne qui devait être sa mère. Elle devina alors que sa génitrice avait dû la trouver. Ce cri eut le don de lui rappeler ceux qu'elle avait tant poussé la nuit précédente et lui fit revivre son traumatisme dans les moindres détails, avant de la plonger dans un véritable coma.
Ce fut alors la fin de la vie et le début de l'Enfer de Rosalie Hale.
Rosalie arriva chez les Black dans l'après-midi. Elle se souvint que les garçons aimaient bien traîner dans le garage du fils de Billy Black. Elle entra dans la maison après avoir frappé - Billy laissait toujours la porte ouverte, ne pouvant se déplacer tout seul - et annonça son arrivée.
- "Billy?" Elle se rendit dans le salon où elle découvrit ce bon vieux Billy Black, assis sur son fauteuil roulant, une bière à la main en train de mater la télévision. Lorsque ce dernier tourna la tête vers la grande blonde, son visage se fendit d'un sourire joyeux.
- "Regardez-moi qui nous revient, la plus indienne des américaines!" S'exclama-t-il.
- "Très drôle." Dit-elle en riant. "Comment vas-tu espèce de bout en train?"
- "Je me porte comme un charme. Quoi que mon fils m'embête un peu en ce moment."
- "Jacob?" S'interrogea-t-elle.
- "C'est que vois tu, monsieur à enfin obtenu ses vingt et un ans* et n'aspire qu'à une chose, boire ce qui lui plait." Elle rigola. Du Jacob tout craché. "Et toi, comment tu vas? Ça fait un bail que je ne t'ai pas vu dans les parages. J'ai bien cru que tu nous avais zappé."
- "Oh, tu sais, je suis beaucoup occupée en ce moment avec le boulot et quelques problèmes personnels…"
- "Ouais, j'ai entendu à propos de la prise d'otage, c'est moche. Tu t'en remets?" Demanda-t-il avec inquiétude. La jeune fille hocha la tête. En vérité le braquage lui sortait complètement de l'esprit. La seule chose qui faisait qu'elle y pensait était le mystère d'Emmett et de ces malfrats.
- "Ne t'inquiète pas, c'est du passé, j'ai eu le temps de m'en remettre." Le vieil indien hocha doucement la tête et tourna la tête vers la télé.
- "Jacob est dans le garage avec des amis. Tu te rappelles de Sam Uley?" Demanda-t-il avec ironie. Elle soupira.
- "Oh, je t'en prie! Présente-moi à Embry pendant que nous y sommes." Il rigola.
- "Excuse-moi mais ça fait tellement longtemps, tu aurais pu oublier quelques personnes."
- "Serais-tu par hasard en train d'essayer de me faire culpabiliser de ne pas pouvoir venir aussi souvent?" Demanda-t-elle avec un sourire.
- "Je plaisante, jeune demoiselle. En tout cas, ça me fait vraiment très plaisir que tu passes la nuit ici. Jake sera ravi de te revoir."
- "Je n'en doute pas." Rosalie monta à l'étage, dans la chambre d'amis pour y déposer son sac. Puis elle redescendit et entreprit de marcher jusqu'au garage.
- "Tu parles!" Entendit-elle rigoler. "Moi, la première chose que je ferai dès qu'on aura attrapé la rouquine, ce sera de lui arracher sa tignasse et d'en faire une écharpe." Les autres personnes se marrèrent.
- "Et à quoi une écharpe pourrait bien te servir idiot?" Reconnut-elle la voix du jeune Black.
- "Bah, je la refilerai à ma mère. Au moins ça lui servira à elle, vu que nous on a pas besoin de ça."
Rosalie ignorait à quelle « rouquine » ils faisaient référence, mais une chose est sure, elle devait vraiment avoir fait quelque chose de mal pour qu'ils parlent d'elle comme cela et être dans leur ligne de mire.
- "Alors les gars, on a des envies de meurtres?" S'annonça-t-elle, alors qu'ils se retournaient tous dans sa direction.
- "Je rêve!" S'écria Jacob. "Blondie est de retour." Il alla l'étreindre amicalement.
- "Alléluia!" Entendit-elle la voix de Sam Uley derrière Jacob.
- "C'est pas vrai, Jake! T'as pris combien de centimètres? Tu ressembles aux catcheurs qu'on voit à la télévision."
- "Mieux que ça, je suis une vraie terreur." Rit-il avant de s'écarter. Elle alla saluer Sam, Embry, Quil et le dernier qui avait parlé de faire une écharpe avec les cheveux de quelqu'un. Elle ouvrit grand ses yeux quand elle le reconnut.
- "Seth? Mon Dieu mais t'as grandi! Je n'avais même pas reconnu ta voix tout à l'heure."
- "Ah parce que t'es là depuis longtemps?" Demanda Sam avec une suspicion dissimulée.
- "Pas vraiment. J'ai juste entendu votre projet de rendre la monnaie de sa pièce à une fille." L'indien soupira de soulagement mais la blonde ne le remarqua pas.
- "Comment se fait-il que tu débarques à l'improviste comme ça?" S'enquit Jake.
- "C'est ça, dis tout de suite que ma présence te dérange." Dit-elle avec une fausse irritation.
- "Non, au contraire. Je vais pouvoir ressortir mes vieilles blagues sur les blondes."
- "Ah non, je t'interdis de recommencer!" Ordonna-t-elle. "Tu m'en as déjà fait assez baver comme ça."
- "Désolé, mais t'es tellement irritable que je ne m'en lasse pas." Rit-il. Elle le suivit dans son hilarité.
- "Paul n'est pas là?" Demanda-t-elle. Les indiens se regardèrent entre eux.
- "En fait il est parti en ballade." Répondit Sam naturellement. Il y a une chose que Rosalie avait toujours été capable de déceler: le mensonge.
Elle sait toujours quand quelqu'un ne dit pas la vérité. Et là en l'occurrence, Sam ne disait certainement pas la vérité. Cependant elle ne s'en accommoda guère. Ce que faisait Paul ne la concernait pas.
Elle discuta longtemps avec les indiens, racontant sa vie et écoutant la leur tout en buvant de la bière mousseuse. Le contact avec les Quileutes lui avait vraiment manqué ces derniers temps. Les fous rires et la décontraction. Elle oubliait tous ces problèmes en leur compagnie. Elle se promit intérieurement de revenir plus souvent. La journée passa rapidement et les gens partirent petit à petit, jusqu'à ce qu'elle se retrouve seule, en compagnie de Jacob Black qui était en train de s'occuper d'une voiture.
- "T'as besoin d'aide?" Demanda-t-elle.
- "Non merci. J'essaie de la rénover, mais il me manque certaines pièces dont j'ai besoin."
- "Et bien dans ce cas, tu n'auras qu'à me donner le modèle et j'essaierai de te les trouver." Proposa-t-elle.
- "C'est gentil, mais je vais réussir à me débrouiller." Ils restèrent silencieux quelques minutes. "Et la fille de Charlie Swan? Comment elle va?" Demanda-t-il. Rosalie soupira. Repenser à Bella lui donnait mal au cœur.
- "A vrai dire… Elle et moi, ce n'est pas vraiment la joie en ce moment." Jacob releva la tête curieusement.
- "Comment ça? Tu m'as toujours dit que vous étiez des sœurs siamoises." Dit-il. Elle rit.
- "Disons que nous sommes en conflit."
- "Oui mais c'est pas très grave, n'est-ce pas?" S'enquit-il.
- "Je ne sais pas Jake. On s'éloigne de plus en plus l'une de l'autre."
- "Mais pourquoi? Il est arrivé quelque chose?" Rosalie baissa les yeux. Elle ne désirait pas vraiment en parler.
- "Dis-moi Jacob… T'as entendu parler des Cullen?" Celui-ci se redressa vivement, l'air étrangement douteux.
- "Bien sûr que j'en aie entendu parler. Mais pourquoi est-ce que tu m'en parles?"
- "Oh, juste comme ça… J'aurais aimé que tu me dises ce que tu penses d'eux." Le jeune indien inspira, puis regarda la blonde avec profondeur et assurance.
- "Les Cullen ne sont pas des gens fréquentables." Elle se demandait pourquoi il était si catégorique à propos d'eux. Cela semblait lui déplaire à son plus grand désarroi. Elle comprit alors pourquoi Bella réagissait aussi brusquement et s'emportait aussi facilement quand elle la sermonnait.
- "Pourquoi penses-tu cela? Tu les connais?"
- "Non, je ne les connais pas, mais oublie-les Rose!" S'emporta Jacob. "Je te dis qu'il ne faut pas t'approcher d'eux." L'attitude du jeune homme lui semblait hors de propos. Pourquoi était-il aussi froid?
- "Est-ce que tu sais quelque chose à propos d'eux?" Risqua-t-elle.
- "Il n'y a rien à savoir à propos d'eux." Répondit-il avec un ton qui se voulait persuasif. Trop, pour ne pas paraître suspect.
- "Dans ce cas pourquoi es-tu si brusque et fermé?" Demanda-t-elle.
- "Parce que je ne les sens pas." Dit-il avec fermeté. "Les Cullen ne sont pas des gens fréquentables." Répéta-t-il. Rosalie et Jacob se regardèrent silencieusement et la jeune femme comprit qu'elle n'obtiendrait rien de plus. Elle se mit à sourire.
- "Je suis contente qu'il y ait enfin quelqu'un qui partage mon point de vue." Dit-elle. Il soupira de soulagement. Il aurait dû se douter que Rosalie ne se serait pas fait bernée par leur perfection et leur beauté artificielle. Elle avait toujours su cerner les gens correctement.
- "Content de savoir que tu ne les aimes pas. Mais je ne vois toujours pas le rapport entre les Cullen et ta mauvaise entente avec Bella Swan." L'évocation de la jolie brune fit perdre le sourire à Rosalie et fit légèrement rougir Jacob.
- "Disons qu'elle se rapproche d'eux considérablement." Surtout de l'un d'entre eux… Aurait-elle voulu préciser.
- "Empêche-la!" Ordonna-t-il.
- "C'est-ce que je n'arrête pas de faire, figure-toi. Elle est têtue comme une mule. Si seulement elle n'avait pas rencontré ce type…" Marmonna-t-elle tout bas, trop bas sans doute pour que la plupart des gens puisse entendre.
- "Quel type?" Demanda-t-il avec curiosité. Apparemment Jacob ne faisait pas parti de la plupart des gens. Rosalie soupira. Au point où elle en était, autant continuer.
- "Elle sort plus ou moins avec l'un d'entre eux. Enfin, je crois. Je n'en sais rien vu que je ne lui ai pas parlé depuis pas mal de temps. Je sais juste qu'ils ont déjà fricoté ensemble." Rajouta-t-elle.
Jacob écarquilla les yeux de stupéfaction. Il en éprouvait comme un pincement au cœur car il s'était plusieurs fois imaginé être celui qui la rendrait heureuse. Et savoir que c'était un de ces « gens » qui prenait sa place… Jamais il n'aurait pu penser que ces monstres étaient capables de ce genre de relations… Cela le dégoûta et l'inquiéta. Puis il se rappela de qui on parlait.
- "Décidément cette fille est bien la reine pour s'attirer des ennuis…" Marmonna-t-il. Assez fort pour qu'elle l'ait entendu.
- "Pourquoi tu dis ça? Je reconnais qu'elle a un drôle d'instinct de survie, mais c'est une fille bien."
- "Je n'ai jamais dit le contraire. Et je suis d'accord avec toi, je l'ai toujours bien aimé d'ailleurs. Et puis elle est jolie. J'aurais bien tenté ma chance si elle n'avait pas eu tous ces problèmes."
- "Tu es au courant de ce qui s'est passé?" Demanda-t-elle, tout d'un coup intéressée.
- "Rosalie, mon père est le meilleur ami du sien. Bien sûr que je suis au courant. Et puis il n'en a pas fallu beaucoup pour que les rumeurs se propagent jusqu'ici, tu sais."
- "Donc tu sais tout?" Décréta-t-elle.
- "Pas vraiment. Je ne m'y intéressais pas vraiment en fait. Pour moi, c'était juste une fille à problèmes."
Jacob ne mentait pas. Il avait toujours considéré Bella Swan comme tel. Il avait bien essayé de sympathiser avec elle au début parce qu'elle lui plaisait, mais elle était un peu trop réservée. Et puis quand elle s'est mise à sortir avec ce gars, il a tout simplement laissé tomber. Pourquoi tenter sa chance avec une fille plus âgée, déjà prise, qu'il ne voyait pas souvent?
La première fois qu'il a eu vent des rumeurs la concernant, il s'était énervé. Il n'avait pas aimé que l'on parle d'elle comme cela. Quand il appris son accident, il fut d'abord inquiet, mais toutes les rumeurs qui fusaient encore plus qu'à l'accoutumée le gavèrent sérieusement. Il demanda plusieurs fois de ses nouvelles et quand il apprit qu'elle s'en sortirait, il arrêta d'y penser.
Il a tout de même tenu à venir la voir à Seattle mais Billy a refusé catégoriquement. Il a donné pour simple réponse que lui vivant, jamais il ne mettrait les pieds dans cet hôpital. Jacob n'a jamais compris pourquoi son père avait été aussi formel et n'a jamais réitéré la demande.
- "Que sais-tu de son accident au juste?" Demanda Rosalie qui eut une idée derrière la tête. Il haussa les épaules.
- "Seulement qu'elle a fait une embardée avec sa bagnole en compagnie de son petit ami."
- "Ce n'était pas sa bagnole, et elle n'en était pas la conductrice." Rectifia Rosalie. Elle a toujours éprouvé un besoin de protéger son amie et de prendre sa défense.
- "Peu importe. Je crois qu'elle était aussi enceinte à ce moment là."
- "C'est exact. Tu ne sais rien d'autre? Je pensais que vous étiez plutôt proche de Charlie Swan…"
- "C'est le cas. Seulement il n'a jamais aimé divulguer beaucoup de choses concernant sa fille. Et puis en ce temps là, lui et Billy étaient en mauvais termes. Je n'ai jamais su pourquoi d'ailleurs…"
- "Je vois. Donc tu ne sais pas qui est-ce que l'a soigné?" Argua-t-elle.
- "Non. Pourquoi? C'est si important?" Rosalie se tut. La façon dont Jake s'est braqué en parlant des Cullen avait attisé sa curiosité. Elle avait fait exprès d'évoquer le sujet de l'accident de Bella pour voir la réaction de Jacob lorsqu'elle lui apprendrait qui avait été le médecin de Bella. Peut être que cela lui donnerait quelques pistes. "Rosalie?" Appela Jacob.
- "Oui?" Fit-elle avec innocence.
- "Dis-moi en quoi le fait de savoir ça est si important." Elle soupira théâtralement.
- "Je pensais juste que tu aurais trouvé cela intéressant de savoir que le médecin qui s'est occupé de Bella n'est autre que Carlisle Cullen."
Dire que l'indien fut surpris par cette révélation était un euphémisme. Bella s'était faite soignée par un de ces buveurs de sang… Tout cela prouvait bien la malchance qui tournait autour de la jeune fille. Doucement, toutes les pièces s'assemblèrent. La raison de la dispute entre Charlie et Billy à l'époque, le refus de son père d'aller lui rendre visite à l'hôpital… Tout cela prenait enfin un sens.
- "C'est donc pour ça qu'elle les fréquente?" Demanda-t-il. Elle rit.
- "Pas vraiment non…"
- "Pourquoi est-ce que tu me parles de ça Rose?" Demanda Jacob. Il commençait à s'énerver.
- "Parce que je sais que tu me caches quelque chose." Rétorqua-t-elle. "J'ai bien vu la façon dont tu as réagi lorsque j'ai mentionné leur nom. Je voulais voir comment tu réagirais si je te racontais ça."
Jake resta silencieux et complètement à court de mot. Tout le monde disait que les blondes ne voyaient rien d'autre que leur miroir de poche, mais Rosalie était capable de prouver que ce cliché était totalement faux. Jamais il n'avait encore rencontré quelqu'un d'aussi perspicace. Lui mentir lui faisait mal.
- "Rose… C'est juste de vieilles légendes de chez nous. Rien de bien passionnant."
- "Des légendes?" S'étonna-t-elle.
- "Oublie ça." Dit-il. "Il s'agit juste d'histoires stupides dans le but de faire peur aux enfants."
- "Et quel rapport avec les Cullen?"
- "Oublie ça! Je n'ai rien à t'apprendre d'accord?" S'emporta-t-il. Il s'en voulait de lui parler comme ça, mais sa connexion spirituelle avec Sam ne lui laissait malheureusement pas le choix. Rosalie jugea son compagnon du regard un moment, puis finit par abandonner.
- "Excuse-moi. En ce moment, je n'arrête pas de faire une fixation sur eux. J'ignore pourquoi, mais je désire vraiment découvrir ce qu'ils cachent pour que je puisse enfin parvenir à faire entendre raison à Bella et l'éloigner d'eux."
- "Écoute. C'est une bonne chose que tu veuilles l'éloigner d'eux. Mais tu dois également t'éloigner de ces gens, toi aussi."
- "Alors, toi aussi tu penses qu'ils sont dangereux? Que Bella risque beaucoup en les fréquentant?" Il hésita. Serait-ce en dire trop que de dévoiler le danger qu'ils représentaient? Après tout, c'est son devoir de protéger les citoyens de Forks, non?
- "Bien sûr, qu'ils sont dangereux. Et il faut à tout prix que tu éloignes ton amie d'eux." Il se mordit l'intérieur des joues. Il en avait déjà trop dit.
- "Mais l'ennui, c'est que je n'y arrive pas. Il faudrait que j'arrive à découvrir ce qu'ils sont." Jacob détourna le regard. Malgré l'envie profonde de lui divulguer tout ce qu'il sait, il ne pouvait tout simplement pas se le permettre. "Je sais que tu sais Jacob. Dis-le moi. J'ai le droit de savoir."
- "Oui, tu as le droit de savoir. Seulement moi, je n'ai pas le droit de t'en parler. Ce sont juste de stupides légendes."
- "Ce que tu dis est incompréhensible et incohérent. Tu refuses d'en parler comme si c'était un secret d'État et ensuite tu me dis qu'il s'agit seulement de légendes idiotes. Faudrait savoir."
- "Je n'ai pas le droit de t'en parler." Trancha-t-il. "Tout ce que je peux te conseiller, c'est de rester éloignée d'eux autant que possible." Elle sourit.
- "Ne t'en fais pas, ils ne font pas partis de mon répertoire." Il rit.
- "Allez viens, on va se commander des pizzas."
- "A condition qu'il y ait des poivrons dessus." Dit-elle. L'atmosphère s'était complètement allégée. Ils firent leur chemin vers la maison.
- "Rose?" Appela-t-il. Elle se retourna.
- "Oui?"
- "Tu m'as manqué Blondie." Elle sourit.
- "Toi aussi Black." Répondit elle.
- "Oh tiens, j'en ai une. Tu sais de quoi meurent les neurones d'une blonde?"
- "Oh pitié!"
- "C'est pas vrai?!?" S'écria Rosalie. "Tu me dis que Sam a largué Leah pour sa cousine?? Quel monstre! Non mais je n'arrive pas à le croire. Et moi qui lui ai fait une accolade cet après-midi… Et puis d'où est-ce qu'elle sort cette Emily? Elle n'a pas honte de voler le petit ami de longue date - voire même fiancé - de sa cousine?"
- "Du calme Rose. Non mais tu te rends compte de ta vitesse de débitage? C'est à se demander si t'as vraiment besoin de respirer…"
- "Tu ne réponds pas à ma question!" S'énerva la blonde.
- "Et à quelle question dois-je répondre au juste?" Demanda l'indien penaud. Elle allait répliquer mais elle se rendit compte de son incohérence. Elle aurait éclaté de rire si elle n'avait pas été aussi remontée.
- "Excuse-moi mais tu ne peux pas m'annoncer une nouvelle pareille sans que je ne monte pas sur mes grands chevaux. Enfin, il s'agit de Sam et Leah. Mon couple model! Comment a-t-il pu lui faire ça? Qui plus est avec sa cousine!" Jacob resta silencieux, méditant sur la façon la plus rationnelle de lui expliquer le lien qui les unit.
- "Tu sais Rose, l'amour n'est pas quelque chose que l'on contrôle. Je peux t'assurer que Sam n'avait pas prévu de tomber amoureux d'une autre."
- "A d'autres! Arrête de le défendre parce que c'est ton ami, il n'a aucune excuse."
- "Détrompe-toi, je ne le défends pas parce qu'il est mon ami. Je le défends parce que je connais les circonstances et que je le comprends."
- "Et quelles sont les circonstances?" Demanda Rosalie ironique.
- "Bon les enfants, non pas que votre présence me dérange, mais j'aimerais beaucoup réussir à suivre mon match sans avoir à entendre les histoires de cœur de Sam Uley." Intervint Billy. Rosalie ne percuta pas la raison de son interruption mais Jacob lui, remercia discrètement son père en le gratifiant d'un coup d'œil entendu pour l'avoir sauvé de cette situation. Dire qu'il avait parlé de cette histoire à Rosalie pour ne pas qu'elle fasse de gaffe…
- "Pardon Billy." S'excusa celle-ci. "Mais j'aimerais vraiment comprendre. Sam était sincèrement amoureux de Leah avant, alors pourquoi ce soudain changement?" Jacob souffla. Il pouvait au moins lui expliquer cela sans dire quoi que ce soit de compromettant.
- "Il n'a pas eu le choix. Lorsqu'il a vu Emily pour la première fois, c'était comme si son monde ne tournait plus qu'autour d'elle. Il ne fait que penser à elle, peu importe l'heure de la journée. Le jour où il l'a aperçu, il a su qu'il ferait n'importe quoi pour elle. Alors c'est vrai qu'il aimait Leah sincèrement et qu'ils avaient des projets ensemble. Mais après ça il ne pouvait tout de même plus rester avec elle, tu comprends?"
Elle se tut.
Elle aurait sûrement rétorqué il y a quelques semaines, mais la façon dont Jacob a parlé de Sam, lui a rappelé Bella. Depuis qu'elle a vu son Edward apparaître dans la boutique, elle n'a fait que penser à lui. Au début, Rosalie a pensé que c'était dû à la ressemblance, puis au lien de parenté avec son ancien médecin. Mais la semaine où Bella était complètement déprimée et fatiguée a laissé planer le doute. Puis quand est arrivé ce samedi chez le concessionnaire, Rosalie a tout de suite remarqué la façon dont Bella dévisageait l'homme qui accompagnait celui avec qui elle se battait.
Elle connaît assez bien son amie pour arriver à bien déchiffrer les émotions qui passent sur son visage. Et là, en l'occurrence, elle a bien cru que Bella était en train d'avoir un coup de foudre sur place. Elle ne s'était pas posée plus de questions que ça, trop occupée à crier sur l'autre macho avec les biceps de Rocky Balboa. Mais quand il a scandé son prénom, elle n'a pu s'empêcher de se demander comment et d'où ils se connaissaient et surtout, pourquoi Bella ne lui en avait jamais parlé. Cela l'avait rendue heureuse pour son amie car peut être qu'elle était enfin prête à tourner la page. De plus, le type était vraiment séduisant. Quand Bella lui apprit son identité, elle se demanda si finalement, elle n'avait pas mal interprété les émotions de Bella au moment où elle l'a vu. Peut être que finalement, c'était juste de l'appréhension et du ressentiment que Bella avait éprouvé en le voyant.
Mais au poste de police, le jour du fameux braquage, elle avait été étonnée de la voir avec lui. Elle avait légèrement espionné Edward et s'était vite rendue compte que tout n'était pas tout à fait clair entre eux. C'est à ce moment là, en les voyant interagir, que Rosalie se rendit compte qu'elle avait en fin de compte interprété correctement les émotions de Bella. Elle n'aurait sans doute eu aucun problème avec ça si elle n'avait pas découvert que les Cullen pouvaient être dangereux. A cet instant, elle a tenu à tout faire pour découvrir ce qu'ils cachaient, dans le but de protéger la personne qui compte le plus pour elle. Elle espérait tout de même que Bella ne se rendrait pas compte de ses sentiments envers lui.
Seulement voilà, le dimanche à Port Angeles n'a pas tourné en sa faveur. Quand Bella est rentrée à la maison, annonçant qu'elle avait elle aussi, découvert les « talents cachés » de cette famille, Rosalie s'est dit que finalement, elle n'aurait sûrement pas besoin d'éloigner Bella des Cullen si elle se tenait écartée toute seule. Malheureusement quand Bella relata sa soirée, plus elle parlait, et plus Rosalie voyait cette étincelle dans ses yeux, étincelle qu'elle n'avait encore jamais vu. Elle se rendit compte que contrairement à elle, Bella n'avait pas eu peur des Cullen, loin de là. Elle était de plus en plus attirée vers eux. Quand elle lui expliqua qu'elle avait dévoilé une partie de son passé, la jalousie et l'inquiétude qu'elle ressentit à ce moment là étaient omniprésentes. Comment Bella avait-elle pu se confier à quelqu'un qu'elle ne connaît qu'à moitié? Elle qui avait mis tellement de temps avant d'en parler à sa meilleure amie? Cela lui était toujours resté en travers de la gorge mais elle avait su passer outre afin de se consacrer uniquement à son but principal: Protéger Bella.
Elle avait l'intention de faire tout ce qui était en son pouvoir pour les démasquer et ainsi prouver à Bella qu'elle avait raison depuis le début et lui montrer qu'ils sont plus que dangereux. Elle se mettra alors à les fuir une fois qu'elle saura ce qu'ils sont réellement.
Mais que sont-ils? Il faudrait déjà qu'elle le sache elle-même avant de tirer des conclusions trop hâtives. Et le premier lieu où elle pourra trouver toutes les réponse qu'elle cherche, est ici même, au sein du territoire Quileute. Elle ne pensait vraiment pas trouver quoi que ce soit en venant ici ce weekend, au contraire elle était venue uniquement pour oublier tout ça. Mais apparemment, il se peut que ce soit ici qu'elle découvre enfin la vérité sur ce qui l'obsède depuis des jours.
Et une fois qu'elle l'aura découvert… Bella prendra peur et se tiendra loin d'eux. Elle était peut être dépourvue d'instinct de survie, mais elle est assez saine d'esprit pour rester loin de ces gens.
Du moins c'est-ce qu'elle a toujours pensé jusqu'à maintenant. Mais en repensant à Sam qui, d'après Jacob, ferait n'importe quoi pour cette Emily Young, elle commença à s'inquiéter quant à la véritable réaction qu'aura Bella en apprenant la vérité. Est-ce qu'elle aussi ferait n'importe quoi pour Edward? Est-ce qu'elle aurait réellement l'intention de se tenir éloignée ou ne pourrait tout simplement pas en être capable?
- "La Terre à Blondie, la Terre à Blondie." Jacob Black la tira de son monologue intérieur. Elle se reprit en secouant la tête.
- "Excuse-moi. Je réfléchissais."
- "Je vois ça. Je ne sais pas de quoi pouvait bien parler ton débat mental mais ça avait vraiment l'air de te tourmenter."
- "Ce n'est pas très important." Mentit-elle. "Je me demandais seulement comment Leah arrivait à gérer cette situation." Il soupira.
- "Et bien pour être honnête, elle en a sérieusement souffert. Mais aujourd'hui elle comprend très bien les sentiments de Sam envers Emily et les accepte. Elle a même été le témoin d'Emily à leur mariage."
- "Le témoin?" Rosalie écarquilla les yeux. "Elle est vraiment courageuse. Je ne sais pas comment elle y arrive. Si un truc de ce genre m'arrivait, je peux t'assurer que j'aurais abattu l'homme à coups de pelle." Il rigola.
- "Là-dessus, je n'en doute pas une seconde."
- "Aurais-je l'occasion de la rencontrer, cette Emily?" Jacob arrêta de rire et devint tout à coup extrêmement sérieux.
- "Je ne sais pas. Elle est probablement occupée."
- "Oh… Tant pis. Essaie de lui dire de passer demain quand même."
- "Je transmettrai le message à Sam." Répondit-il. Rosalie s'étonna. Pourquoi Jacob n'était-il pas très enclin à ce qu'elle rencontre Emily? Elle n'eut pas l'occasion de se poser la question plus longtemps car le portable de Jacob retentit dans la maison.
- "Allo?" Fit-il après avoir décroché. "…Où ça?… Maintenant?… J'arrive tout de suite." Dit-il avant de raccrocher.
- "Que se passe-t-il?" Demanda Rosalie avec anxiété. Jacob la regarda soucieusement, avant de prendre une expression décontractée.
- "Les mecs ont trouvé certaines pièces manquantes pour la voiture que je suis en train de réparer. Je dois aller chez Sam pour les récupérer."
- "Oh, je peux venir avec toi? Tu sais que les voitures sont ma seconde passion. Et puis ça me donnera l'occasion de rencontrer Emily." Jacob afficha un air grave et suppliant.
- "En réalité… Je préfèrerais que tu ne viennes pas. Il se fait tard et tu as l'air fatiguée. Tu devrais aller te coucher." Devant la mine qu'affichait Jacob, Rosalie sentait bien qu'il ne voulait clairement pas qu'elle l'accompagne. Elle aurait bien aimé demander pourquoi mais elle savait que ce serait peine perdue.
- "Oh… Très bien." Fit-elle avec dépit. "Tu as raison, je suis plutôt fatiguée." Jacob sourit, à la fois heureux et incrédule d'avoir gagné aussi facilement. Comment se faisait-il que Rose abandonne aussi rapidement? Il s'était préparé mentalement à devoir répliquer un nombre incalculable de fois avant qu'elle ne cède. Cette pensée l'inquiéta. Il espérait qu'elle ne prévoyait pas de faire quoi que ce soit derrière son dos.
- "Bonne nuit dans ce cas. Papa, je vais chez Sam pour affaires." Le vieux hocha la tête.
- "Sois prudent sur le chemin." Le jeune acquiesça. Pourquoi Rosalie avait-elle l'impression que la phrase de Billy était à double sens? Comme s'il ne parlait pas réellement de la conduite de son fils…
Jacob se dirigea vers la porte, mais Rose l'interpella.
- "Tu ne prends pas de manteau? Tu vas attraper la grippe." Il se tapa le front d'une manière théâtrale.
- "Quel étourdi je fais. On aurait sincèrement besoin d'une présence féminine ici." Il prit le premier blouson qui lui tomba sous la main et sortit de la maison, non sans avoir gratifié son père et son amie d'un « Bonne Nuit » au préalable.
Rosalie était vraiment abasourdie par l'attitude plus qu'étrange de son ami l'indien. Elle se retourna vers Billy.
- "Ça ne te dérange pas qu'il sorte soudainement à cette heure?" Le vieux haussa les épaules.
- "Bah, tu sais, il est adulte maintenant et sait ce qu'il fait. Et puis au cas où t'aurais pas déjà remarqué, il est largement capable de se défendre lui-même." Elle rit. Il est vrai que Jacob était plutôt bien bâti.
- "Ouais tu as raison. Je crois que je vais aller me coucher." Déclara-t-elle. "Bonne nuit Billy."
- "Bonne nuit jeune fille."
Elle monta assez rapidement et s'engouffra dans sa chambre. Elle s'avança vers son lit avant de remarquer le reflet de la lune à travers la fenêtre qui donnait vue sur l'arrière de la maison. Elle s'approcha doucement afin d'observer de plus près. C'était la vue qu'elle préférait. Celle de la nuit, ainsi que les étoiles. Elle n'en voyait pas beaucoup à cause des nuages mais les quelques étoiles visibles rendaient le ciel encore plus beau.
Soudain elle vit une ombre à travers la fenêtre. Elle fronça les sourcils de mécontentement avant de pencher la tête vers le bas pour voir ce qui a entaché sa jolie vue. Si elle avait pu, à cet instant elle aurait souhaité ne jamais avoir posé les yeux sur cette fameuse ombre.
Elle mit son poing dans sa bouche pour s'empêcher de crier quand elle reconnut Jacob, en train de finir de déshabiller. Mais que lui arrivait-il? Était-il fou? Ça lui arrive souvent de se déshabiller dehors, derrière sa maison en pleine nuit avec ce froid? Bien sûr, elle n'eut pas le temps de se poser plus de questions puisqu'une fois que Jacob fut entièrement nu et que Rosalie ait pu voir des choses qu'elle n'aurait jamais pour rien au monde, avoir voulu voir, ce qu'elle vit la terrorisa autant que ça la fascina. Jacob bondit d'une seul coup, puis en une fraction de seconde, le petit Jacob Black qu'elle connaissait avait disparu. Ce qu'elle avait devant ses yeux n'étais pas un homme, mais un animal. Un immense animal. La bête se retourna et Rosalie pu reconnaître qu'il s'agissait d'un loup. Un loup géant, effrayant.
Elle ne réagissait pas, ne pouvait émettre le moindre son, ni effectuer le moindre mouvement. Elle était totalement paralysée par ce qu'elle voyait. Puis tout d'un coup, plus rien. Le loup avait disparu, remplacé par la nuit sombre et silencieuse qui lui paraissait si terne à présent.
En réalisant ce à quoi elle venait d'assister, Rosalie en tomba à la renverse, au sens propre du terme puisqu'elle se retrouva par terre sur les fesses et les yeux toujours rivés fixement sur la fenêtre. Les battements de son cœur étaient irréguliers, allant de plus en plus rapidement et sa bouche était à moitié ouverte, laissant échapper sa respiration bruyante. C'était impossible. Elle n'avait pas pu voir ce qu'elle venait de voir. Jacob en loup, non mais c'est du délire! Elle avait probablement rêvé. C'était la seule explication rationnelle qui lui venait. Mais depuis quand pensait-elle de façon rationnelle? Elle pense bien que les Cullen ne sont pas normaux alors pourquoi pas les Quileutes? Non, impossible. Elle était seulement fatiguée. Mais comment aurait-elle pu imaginer un tel phénomène? Comment savoir si c'était réel ou tout droit sorti de son imagination? C'est là que l'idée lui apparut. Elle se leva d'un bond, se rua sur la fenêtre avec hâte, et entreprit de vérifier si elle avait finalement rêvé ou non. C'est à ce moment là qu'elle les vit. Ils étaient bel et bien là, éparpillés à même sur l'herbe.
Les vêtements de Jacob.
Ceux qu'il avait portés toute la journée et qu'il avait ôté avant de disparaître. Elle n'avait donc pas rêvé. Si les vêtements étaient là, cela voulait dire qu'il s'était bien déshabillé et que par conséquent, il s'était bien transformé en loup. Rosalie fit alors ce qui lui parut le plus sensé à cet instant. Elle cria.
Elle cria pour ce qu'elle venait de voir, mais aussi parce qu'elle n'avait jamais pu crier pour ce qu'elle avait vu à la banque. Elle cria un bonne fois pour enfin extérioriser ses doutes et ses peurs et laisser parler son humanité.
Elle se recula prestement et sortit de la chambre en trombe. Elle dévala les escaliers et se trouva nez à nez avec un Billy alerté, après avoir entendu les hurlements de la petite.
- "Rosalie, que s'est-il passé?" Demanda-t-il. Lorsqu'il vit le visage affolé de la jeune fille, il s'inquiéta sérieusement. "Rosie, qu'est-ce qu'il y a? Je t'ai entendu crier. Dis moi ma belle." Rosalie tenta vainement de se recomposer et lui répondit avec des trémolos dans la voix.
- "Rien, je… J'ai seulement allumé mon portable et j'ai paniqué en voyant tous mes appels manqués." Mentit-elle. Billy l'observa un instant, sceptique. "Euh… Je vais dehors… Pour téléphoner."
Elle n'attendit pas de réponse de Billy et courut presque vers la porte. Elle sortit en vitesse, sans se préoccuper du froid. Elle se précipita à l'arrière de la maison et trouva ce qu'elle cherchait sur le sol. Elle s'accroupit par terre et prit quelques vêtements de Jake dans ses mains, histoire de rendre la situation encore plus réelle, de lui donner un sens. Elle ne ramassa que son tee-shirt, son Jean et son blouson, laissant son sous-vêtement à sa place car elle ne voulait certainement pas le toucher. Elle repartit à l'intérieur avec les vêtements et fonça vers les escaliers, histoire de ne pas avoir affaire à Billy. Elle rentra dans sa chambre de nouveau, alla vers la fenêtre pour tirer les rideaux et s'écroula sur le lit, les vêtements toujours en sa possession. Elle ne se changea même pas, ne prit même pas la peine de faire sa toilette avant d'aller dormir. Elle resta simplement allongée, les yeux grands ouverts, les vêtements de Jacob contre son ventre.
Inutile de préciser que Rosalie Hale ne dormit pas de toute la nuit ni ne ferma l'œil.
Le matin arriva.
Bien trop vite pour elle malgré sa nuit blanche. Elle n'avait pas bougé d'un pouce depuis le moment où elle s'était allongée. Ses yeux qui auraient dû être cernés par le manque de sommeil étaient pleinement ouverts, comme si elle avait passé une nuit bien reposante. Elle se leva d'un bond, tel un automate, se dirigea hors de la chambre en laissant les vêtements qu'elle avait tenu toute la nuit sur le lit et descendit les marches pour se retrouver devant un Billy en fauteuil roulant, en train de prendre son petit déjeuner. Celui-ci leva les yeux vers elle et la gratifia d'un regard prudent.
- "Comment vas-tu ce matin?" Demanda-t-il. Elle marqua un temps avant de répondre et en s'asseyant en face de lui.
- "Bien."
- "Tu n'as rien à me dire?" Elle releva la tête vers lui. Celui-ci pointa le blouson de Jacob, posé sur le comptoir de la cuisine. Elle n'avait même pas réalisé qu'elle ne l'avait plus ce matin. "Quand je suis rentré dans ta chambre cette nuit pour voir si tu dormais, je t'ai vu les yeux grands ouverts avec cette pile de vêtements que tu tenais contre toi. J'ai bien vu que le blouson était de trop alors je l'ai récupéré."
Rosalie écarquilla les yeux. Comment avait-il pu entrer dans sa chambre sans qu'elle ne le remarque? Est-ce qu'il savait pourquoi elle était dans cet état? Quelque chose lui disait que oui, il savait.
- "Tu es vraiment entré? Non parce que je ne t'ai pas vu du tout cette nuit." Elle se tut, craignant la réaction du vieux bonhomme.
- "Tu avais peut être les yeux ouverts mais crois moi, tu n'étais pas du tout éveillée. Ou du moins, tu étais sur une autre planète." Rosalie baissa la tête.
- "Excuse-moi. Seulement je…"
- "Ce n'est pas avec moi que tu dois t'expliquer Rose." Le coupa-t-il. "Jacob est chez Sam. Je ne lui ai pas dit que tu avais vu ce que je pense que tu as vu mais… Tu ferais bien de parler avec lui avant que tu ne t'en ailles."
- "Merci Billy." Elle sortit de la pièce avec pour but de se laver mais il l'interpella.
- "Rosalie!" La concernée se retourna. "Je suis vraiment désolé que tu aies assisté à ça dans de telles circonstances." Elle soupira.
- "Moi aussi Billy. Moi aussi." Puis elle se détourna et partit.
L'arrivée chez Sam fut rapide avec sa voiture. Elle se gara devant et descendit, la peur au ventre. Elle frappa à la porte et quelques secondes plus tard, une femme brune lui ouvrit. Elle n'était pas très grande, assez mince et était plutôt jolie. Mais ce qui frappa Rosalie n'était rien de tout ça. Ce qui l'horrifia était son visage. Car bien qu'il soit tout de même joli, il avait une énorme marque. On aurait dit que la jeune fille s'était faite défigurer par une brûlure et que la cicatrice n'est jamais partie.
- "Vous êtes?" Demanda-t-elle, ramenant Rosalie au moment présent.
- "Excusez-moi… Je cherche Sam. Enfin non, je cherche Jacob mais on m'a dit qu'il était chez Sam. Donc je cherche Sam… Enfin Jacob mais puisqu'il est chez Sam c'est qu'il doit être avec lui donc si je trouve Sam, je trouverai Jacob, donc finalement je cherche Sam vu que Jacob est avec lui. Même si en réalité, c'est Jacob que je recherche car s'il n'est pas avec Sam, je n'ai aucune raison de chercher Sam. Donc je recherche Jacob, qui est avec Sam." La jeune brune se mit à rire doucement.
- "Tu es Rosalie, n'est-ce pas?" Devina-t-elle. Rosalie se figea. Comment diable cette fille connaît-elle son prénom? "Oh, ne te méprends pas." Dit-elle en voyant l'inquiétude sur le visage de la blonde. "C'est seulement que Sam m'avait dit que tu serais chez Jacob ce weekend et il m'a parlé de toi et de ta façon de parler sans jamais respirer." La blonde esquissa un sourire.
- "Ouais, c'est tout moi. Rosalie Hale. Enchantée." Fit-elle en tendant sa main.
- "Emily Uley. Ravie de faire enfin ta connaissance."
- "Donc tu es la femme de Sam. Ça va, tu tiens le coup?" Elles rirent toutes les deux.
- "Tout va très bien rassure-toi." La jeune femme paraissait vraiment gentille et faite pour Sam. Rosalie sentait qu'elles auraient pu discuter longtemps comme cela, mais elle n'était pas du tout là pour ça, à vrai dire.
- "Bon, ce n'est pas que tu m'ennuies, au contraire tu me sembles très sympa mais je cherche Jake. J'ai une discussion très importante à avoir avec lui." Emily hocha la tête.
- "Je suis désolée mais ils sont tous partis à la plage. Tu le trouveras là-bas."
-" Merci Emily. J'ai été ravie de faire ta connaissance."
- "Moi aussi. Tu devrais passer plus souvent dans le coin." Rosalie hocha la tête faiblement, en proie à la nostalgie et aux regrets.
- "A bientôt." Fut tout ce qu'elle trouva à dire avant qu'Emily ne referme la porte.
Bien sûr qu'elle aurait aimé venir plus souvent voir ses amis, elle était souvent avec eux durant son enfance. Mais après son viol, elle s'est enfermée chez elle, ne voulant voir personne. Ils sont évidemment tous passés plusieurs fois pour prendre de ses nouvelles, la réconforter, prendre soin d'elle. Mais elle ne disait pas un mot. Elle restait muette et les seules fois où elle sortait, étaient pour son rendez-vous chez le psychologue. Le jour où elle a reparlé pour la première fois était lorsque Bella lui a adressé la parole. Elle l'avait trouvé dans un état tellement pitoyable, qu'elle s'était sentie malgré elle compatissante. Et quand elle a entendu sa voix hésitante lui parler d'un sujet totalement abstrait et hors de propos, elle avait pour la première fois depuis longtemps, l'impression de ne pas être prise en pitié. Quand elle avait croisé le regard de Bella, pour la première fois depuis son viol Rosalie avait été regardée comme si elle était une fille parfaitement normale, sans aucune trace de compassion.
Mais même après sa convalescence psychologique, Rosalie ne fréquentait plus les Quileutes. Elle passait son temps avec Bella, se sentant plus proche d'elle que de n'importe qui d'autre. Puis elle est partie peu de temps après s'installer dans Forks et ne les a plus revus depuis. Elle ne s'en sentait pas capable, ni la force de les revoir. C'est pour cette raison qu'elle n'a jamais su que Sam avait rompu avec Leah et s'était marié avec Emily. Bien sûr, elle parlait régulièrement au téléphone avec certains d'entre eux. Notamment Jacob, Paul et Embry. Revenir ce weekend après tout ce temps était pour elle un grand pas en avant.
L'autre raison pour laquelle Rosalie n'aimait pas que Bella fréquente les Cullen est que toutes ces années, elle a toujours pensé qu'elle était celle qui s'était le mieux remise de sa situation. Mais en voyant Bella s'ouvrir à d'autre personne et même tomber amoureuse, elle s'est rendue compte qu'elle se trompait, que c'était Bella qui avait tourné la page le plus rapidement. Elle avait honte de penser comme ça et d'être jalouse pour si peu, mais elle ne pouvait s'en empêcher. Alors elle s'est dit que si Bella avait réussi à aller de l'avant et à refaire sa vie, pourquoi pas elle?
C'est donc avec cette détermination qu'elle a décidé de renouer avec sa terre et ses amis d'origine, en allant les voir ce week-end. Elle avait été très surprise d'avoir été aussi bien accueillie la veille. Quant elle avait appelé Jacob pour lui annoncer sa venue, il avait été évidemment enchanté mais elle avait tout de même appréhendé de se retrouver face aux autres après tout ce temps. Elle aurait dû se douter que les connaissant, ils lui proposeraient de tirer un trait en buvant de la bière et en rigolant.
Rosalie remonta dans sa voiture et roula en direction de La Push. Une fois sur place, elle se gara face à la mer et descendit du véhicule en scrutant la plage, espérant ainsi repérer celui qu'elle cherchait. Elle marcha quelques minutes en scindant l'horizon mais la plage était visiblement déserte. Elle commençait à désespérer et s'apprêtait à abandonner lorsqu'elle vit le petit groupe en train de discuter, assis en rond sur le sable. Elle alla les voir, déterminée à tirer les vers du nez à Jacob.
- "Hey Jake!" Cria-t-elle, tout en s'approchant. Ils se retournèrent en même temps.
- "Rosalie." Salua Sam avec sérénité. "Tu viens dire au revoir avant de reprendre la route?"
- "Pas vraiment. En fait, j'ai besoin de parler avec Jacob." Dit-elle sérieusement.
- "Je savais pas que tu étais là Rosie." Déclara Paul, qu'elle n'avait pas revu depuis longtemps. "Comment vas-tu blondinette?" Apparemment il était revenu de sa « ballade » de la veille. Rosalie trépignait de lui demander ce qu'il était vraiment allé faire hier, mais elle se reconcentra et lui sourit.
- "Salut Paul. En vérité j'ai logé chez Jacob hier, mais je dois repartir aujourd'hui. C'est pour ça qu'il faut que je lui parle." Ce dernier marmonna quelque chose d'incompréhensible.
- "Et ça ne peut pas attendre? Parce que nous sommes plutôt occupés discuter de choses assez importantes." Elle lui fit un sourire plein d'empathie.
- "Oh, je suis certaine que ce dont vous parlez est important, mais si tu ne viens pas maintenant, tu risques de le regretter Black." Le jeune homme soupira avec lassitude et se leva.
- "Ce que la femme veut, la femme l'obtient. Attendez-moi les gars." Il emboîta le pas et Rose le suivit derrière. Une fois arrivés à une distance suffisamment éloignée des oreilles indiscrètes, ils se fixèrent. "Bon alors, qu'y a-t-il?" Demanda-t-il. Elle le regarda attentivement.
- "Où es-tu allé hier soir?" Jacob fronça les sourcils. Il s'était attendu à ce qu'elle lui parle d'une chose futile et sans intérêt, c'est pour cela qu'il n'était pas très enclin à discuter. Mais cette question le désarçonna.
- "Je te l'ai dit, il me semble."
- "Tu m'as dit que tu allais chez Sam pour récupérer des pièces de voiture." Répondit-elle.
- "Et bien oui." Dit-il, complètement paumé. Rosalie le scruta avec ce regard insistant et profond qu'elle faisait si bien.
- "Je veux que tu me le dises une dernière fois. Où es-tu allé cette nuit?" Le jeune homme ne prononça mot. Il aurait tellement voulu lui dire la vérité, cela aurait été tellement plus simple. Il resta silencieux quelques secondes avant de répondre avec clarté.
- "Pour la dernière fois, je suis allé chez Sam comme tu viens de le dire, afin de récupérer des pièces pour la voiture que je rénove. Maintenant je ne comprends pas pourquoi tu m'as dérangé seulement pour me demander ça alors que tu connaissais déjà la réponse." Termina-t-il. Rosalie resta muette. Puis elle prit son sac à main de sur son épaule et farfouilla dedans pour en ressortir un tee-shirt qu'elle avait prise chez lui avant de venir le voir. Elle lui lança et le regarda avec déception.
- "Ça faisait parti des vêtements que j'ai retrouvés derrière chez toi hier soir. Je suis allée les prendre après que tu te sois mis à poile et que tu te sois sauvé."
Puis elle fit demi tour en le laissant là, complètement abasourdi. Il observa le tee-shirt et se passa la main sur le visage. Quel idiot. Combien de fois son père lui avait-il dit de ne pas se transformer près de la maison? Combien de fois s'était-il fait remonter les bretelles? Il voyait son amie qui marchait et se sentit violemment coupable. Il ne savait pas si elle avait tout vu ou si ce n'est pas le cas, ce qu'elle devait penser mais ce qu'il savait, c'est que s'il ne lui disait pas la vérité maintenant, il la perdrait à jamais.
- "Rosalie attends!!" Hurla-t-il à plein poumon. Elle se retourna et le vit courir vers elle. "Je vais t'expliquer…"
- "Laisse-moi tranquille Jacob!" Cria-t-elle. Elle allait repartir mais il parla à nouveau.
- "Mon père m'avait prévenu de ne pas me transformer derrière la maison." Elle releva les yeux vers lui.
- "Quoi?"
- "S'il te plait Rose. Permets-moi au moins de m'expliquer et ensuite tu pourras t'en aller. S'il te plait…" Implora-t-il. Elle le jugea deux minutes avant de réaliser qu'il était vraiment prêt à dire la vérité.
- "Très bien. Mais tu n'as pas intérêt de me mentir car je le saurai." Il se mit à sourire.
- "Viens on va marcher." Elle acquiesça et ils commencèrent à marcher avant d'attaquer la discussion importante.
- "Alors?" Demanda-t-elle. Cela faisait quelques minutes qu'ils marchaient dans un silence de plomb et elle avait l'impression qu'il s'agissait des minutes les plus interminables de toute sa vie.
- "J'aurais vraiment aimé que tu ne l'apprennes pas comme ça." Dit-il.
- "Ton père m'a dit la même chose." Il la regarda, étonné. Que lui avait-il dit d'autre? Connaissant son père, il était loin d'être une commère quand il s'agissait de l'histoire des Quileutes. Le silence retomba. Rosalie le brisa une nouvelle fois. "Alors c'est vrai?" Demanda-t-elle avec anxiété. Il n'osa pas la regarder.
- "Que veux-tu que je réponde?"
- "Je ne sais pas. Dis-moi que je me suis trompée, que j'aie rêvé et que je suis complètement timbrée. Que je suis tellement parano et folle que je me mets à avoir des hallucinations et à voir des gens se déshabiller en pleine nuit pour ensuite se transformer en loup!" Elle commençait à paniquer. Elle avait tenu à avoir cette discussion, mais maintenant qu'elle réalisait qu'elle allait enfin avoir la confirmation de l'existence du surnaturel dans un monde qu'elle avait toujours cru rationnel, elle avait peur. Peur de ce qu'elle allait entendre.
- "Rosalie." Dit-il. "Sache que tu n'es ni timbrée, ni parano, ni folle. Tu n'as aucune hallucination et il existe bel et bien des gens assez fous pour se désaper en pleine nuit." Rosalie faillit sourire. Comme toujours, Jacob essayait de parler avec légèreté.
- "Alors explique-moi. Tu es un loup c'est ça?" Jacob l'observa avec attention. Puis il répondit.
- "Ça a commencé il y a deux ans. Vois-tu, nous les Quileutes sommes descendants des loups. Nos ancêtres en étaient. Mon grand père Ephraïm Black était le chef. On les appelle Alpha."
- "Eh oh. Doucement, je ne comprends strictement rien. Ton grand père était un loup?"
- "Il était comme moi. Ou plutôt c'est moi qui suis comme lui. On se transforme à volonté pour défendre notre tribu."
- "La tribu Quileute?"
- "Ainsi que la population de Forks." Acquiesça-t-il.
- "Et comment ça marche? Je veux dire… Comment ça s'est passé? Et pourquoi?""
- "Le premier à muter fut Sam. Il est resté quelques temps seul avant que chacun notre tour, nous le rejoignîmes. Tout est dans nos gênes.
Rosalie resta pensive et incrédule. Il y a quelques temps, elle serait tombée des nues en apprenant ça et aurait sans doute fait un malaise ou fuit loin d'ici. Mais depuis qu'elle s'est faite à l'idée que des gens appartenant au monde surnaturel existaient, elle ne trouvait pas les révélations de Jacob si extraordinaires. Surtout après avoir passé une nuit entière à y penser. Elle s'était demandée s'ils étaient méchants, mais cela lui semblait improbable. Car contrairement aux Cullen, les Quileutes ne lui semblaient pas du tout dangereux. Elle n'a pas éprouvé de peur à leurs cotés comme elle en éprouve face à cette famille. Pour elle ça avait plutôt été un choc et de la surprise. Une énorme surprise. Elle s'était même crue folle.
- "Donc vous êtes les justiciers de Washington en quelque sorte." Il rit.
- "On peut dire ça. Nous nous considérons plutôt comme des gardiens."
- "Mais des gardiens contre quoi?" Demanda-t-elle perdue.
- "Tu devrais plutôt te demander contre qui." Dit-il avec une légère mise en garde mal dissimulée et une insinuation douteuse. Rosalie le regarda avec curiosité. Elle ne mit pas longtemps à réfléchir avant de comprendre soudainement à qui il faisait référence.
- "Je vois. Tu veux dire que vous êtes contre les Cullen c'est ça?" L'indien ne répondit pas, il était en plein débat intérieur. Il savait qu'il ne devrait pas en parler mais il s'était promis de lui dire la vérité.
- "Pas directement."
- "Je ne comprends pas."
- "Je ne peux pas t'expliquer." Dit-il. "Je n'en ai pas le droit."
- "Mais tu m'as promis de tout me dire." Contra-t-elle énervée.
- "Tout mais pas ça!" S'emporta-t-il. Elle eut un mouvement de recul instinctif. Il pouvait vraiment faire peur quand il haussait le ton. "Excuse-moi." S'excusa-t-il après s'être rendu compte de son attitude. "Je veux bien te parler, seulement ce sujet est strictement confidentiel. Je trahirais ma tribu si je le faisais."
- "Mais pourquoi?" Insista-t-elle.
- "Parce que!" Rétorqua-t-il. "Nous avons fait un pacte avec eux."
- "Un pacte?" S'étonna-t-elle. "Tu veux dire que vous les avez rencontré?"
- "Pas nous. Nos ancêtres." Rosalie écarquilla les yeux.
- "Ton grand père a rencontré les Cullen? Mais enfin c'est impossible. Tu as vu leur âge?"
Jacob la fixa en haussant un sourcil, comme pour marquer l'évidence. Rosalie ouvrit la bouche de surprise. C'en était trop pour son petit cœur. Trop pour son cerveau et sa raison.
Déjà le fait d'imaginer son Jacob en loup avait anéanti toutes ses revendications, ce en quoi elle croyait ainsi que sa lucidité. Mais imaginer dorénavant les Cullen en des êtres éternellement jeunes la faisait flipper à un point où elle ne pourrait jamais s'en remettre. Pas tant qu'elle ne saura pas une bonne fois pour toutes, leur identité secrète.
- "Qu'est-ce qu'ils sont?" Redemanda-t-elle. "Ils sont des loups eux aussi?"
- "Ça va pas la tête? Ne redis jamais un tel blasphème!" Hurla-t-il.
- "Alors dis-le moi! Je t'en supplie Jake. Ne pas savoir en devient insupportable. C'est comme si je n'arriverais jamais à connaître le repos éternel avant d'avoir enfin la réponse à la question que je me pose depuis des jours, des nuits, des semaines!"
Le jeune homme la regarda tristement. Que cela lui coûtait d'entendre cela… Qu'il aurait tant aimé assouvir sa curiosité en lui dévoilant la clé qui lui permettrait de pouvoir enfin dormir paisiblement la nuit et de vivre tranquillement… Mais il ne le pouvait pas. Il ne le pourrait malheureusement jamais. Cette constatation lui faisait réellement mal au cœur.
- "Je suis désolé. Je peux t'expliquer tout ce que tu veux savoir à propos de nous, mais pour ce que tu recherches, je ne peux pas t'aider."
- "Pourquoi? Si vous ne les aimez pas, pourquoi les défendre?"
- "Nous ne les défendons pas. Je te l'ai dit. Nos ancêtres ont passé un traité avec eux."
- "En quoi consiste ce traité?" Demanda-t-elle avec irritation.
- "S'ils laissaient nos terres tranquilles, nous nous engagions à ne pas révéler leur vraie nature."
- "Tu sembles oublier une chose primordiale." Jacob la regarda, attendant qu'elle développe. "Vois-tu, je suis moi aussi une Quileute alors je pense avoir le droit de le savoir."
- "Faux." Dit-il." Tu as habité sur le territoire Quileute mais cela ne fait pas de toi une concernée. Tu n'es pas indienne, tu n'as pas un frère qui mute et de plus, tu es partie. Tu ne vis plus ici, tu ne nous côtoies plus depuis longtemps que par téléphone. Les lycéens qui vont au lycée de la réserve, crois-tu qu'ils soient au courant de tout ça? Si je ne me transformais pas en loup garou, crois-tu sincèrement que j'aurais été au courant de tout ça? Oh, bien sûr que j'en aie entendu parler dans ma jeunesse, mais pour moi, c'était seulement de vieilles légendes sensées faire peur. J'en aurais sans doute bien ri avec toi mais aujourd'hui, je sais désormais que tout cela est vrai, alors cesse de me harceler avec ces monstres parce que je ne te dévoilerai rien!"
Abasourdie, silencieuse, immobile, paralysée, bouleversée, tels sont les adjectifs qualifiant l'état dans lequel Rosalie écoutait le monologue de son ami. Elle se sentait terriblement mal. Mal pour lui. Elle savait bien qu'il lui en avait tout de même voulu pour avoir coupé les ponts aussi brusquement. Même s'ils l'avaient tous accueillie à bras ouverts, elle ne s'était pas faite d'illusion. Mais jamais elle n'aurait cru que Jacob aurait été autant affecté par son absence.
- "J'ignorais que je t'avais fait autant de mal en disparaissant. Je suis vraiment désolée." Dit-elle sincèrement.
- "Une rupture brutale, non mais tu t'attendais à quoi? Bien sur que je t'en veux. Je t'ai pardonné il y a bien longtemps mais je n'ai jamais oublié." Dit-il avec du ressenti.
- "Je… Je ne sais pas quoi te dire." Elle baissa la tête, mortifiée.
- "Il n'y a rien à dire. Ce qui est fait est fait. Inutile d'en reparler." Ils se regardèrent en silence, réalisant tous les moments qu'ils avaient perdus et manqués.
- "Ne peut-on pas tout reprendre de zéro?" Supplia-t-elle.
- "Ça ne servira à rien. Ce qui s'est passé fait parti de notre relation, la blessure, la rancune, le pardon… C'est tout ce qui fait qu'aujourd'hui, nous sommes à nouveau amis et soudés, n'est-ce pas?" Elle sourit.
- "Est-ce que je peux te demander quelque chose?"
- "Ce que tu voudras."
- "J'ai fait la connaissance avec Emily tout à l'heure. C'est une chouette fille. Seulement j'ai vu son visage et sa cicatrice. Est-ce que c'est à cause de ça que tu ne voulais pas que je la rencontre?" Il hocha la tête.
- "J'aurais vraiment aimé te la présenter mais tu m'aurais posé des questions et j'aurais été dans l'incapacité d'y répondre."
- "Donc cela veut dire que c'est un loup qui a fait ça?" Jacob fronça les sourcils. Comment diable Rosalie faisait pour être toujours si intuitive?
- "Il faut que tu saches que parfois, lorsque nous nous énervons, il nous arrive de perdre notre contrôle et d'agir en conséquences." Elle resta stoïque.
- "Que lui est-il arrivé Jake?"
Demanda-t-elle avec inquiétude. Il ne voulait pas répondre. La faiblesse de son ami n'était pas quelque chose qu'il aurait aimé dévoiler. En observant Jacob, Rosalie se rendit compte qu'il avait une certaine aversion à répondre. Elle avait deviné que c'était un Quileute qui lui avait fait ça. Mais qui? Jacob était incapable de faire ça. Et pourquoi est-ce que quelqu'un lui ferait ça? Perdre le contrôle… Qui pourrait perdre le contrôle devant Emily?
"Sam?" Murmura-t-elle. Jacob ne releva pas la tête. "Mais enfin il est malade? Pourquoi avoir fait ça? Tu m'as dit qu'il l'aimait, qu'il ferait n'importe quoi pour elle…"
- "Et il s'en veut à chaque heure du jour et de la nuit pour ça." Répondit-il avec tristesse.
- "Et elle? Comment fait-elle pour le lui pardonner?" Demanda-t-elle incrédule.
- "Elle le comprend. Et elle l'aime profondément. Oh, Rose, il y a tellement de chose que tu ne sais pas. Tu ne peux pas juger avec le peu d'éléments dont tu disposes." Elle médita sur ces paroles.
- "Et si tu m'en parlais dans ce cas?"
- "Ce serait beaucoup trop long. Passe-moi un coup de téléphone."
- "Tu es sérieux? Tu veux vraiment parler de ça au téléphone?" Demanda-t-elle amusée.
- "Ou alors ça te donne une occasion de revenir." Elle sourit. Lorsqu'elle vit le soleil haut dans le ciel, ce fut comme une réminiscence, un apaisement. Le plus dur était passé, ne restait plus que le plus léger et le plus gai.
- "En fait, j'ai envie de profiter du soleil en ce dimanche. Que dirais-tu de passer la journée avec moi avant que je ne retourne chez moi et de me raconter tout ce qu'il y a d'intéressant à savoir sur les loups garous de La Push?" Je jeune homme sourit.
- "Avec plaisir, jeune demoiselle."
Et c'est ainsi qu'ils passèrent la journée ensoleillée à discutailler. Elle était complètement fascinée par les histoires que lui relatait Jacob, et lui était vraiment heureux de parler de ça avec elle.
L'après-midi passa comme une microseconde, tellement ils étaient absorbés dans leur bulle. Mais lorsqu'il commençait à se cacher, Rosalie décida avec peine qu'il était temps pour elle de reprendre la route. De plus, elle avait pas mal de chose à remettre en ordre dans sa tête. Les au revoir furent brefs. Rosalie ne se sentait pas prête psychologiquement à affronter tous les autres qui n'étaient pas au courant qu'elle savait. Jacob lui avait dit qu'il fallait qu'il le leur dise lui-même car ils risquent tous de se montrer très réticents. Elle lui promit de revenir et qu'elle lui téléphonerait prochainement. De toute façon, il y avait trop de choses à mettre au clair pour qu'elle refuse.
Qui aurait cru qu'en venant ici, elle découvrirait tout ce monde extraordinaire et fantastique? Elle qui pensait passer un weekend de détente… Il semblerait qu'elle ait mal choisi sa destination.
C'est avec la tête lourde mais le cœur léger, qu'elle repartit en direction de Forks avec encore plus de détermination à protéger Bella et découvrir ce que cachent les Cullen.
Rosalie avait garé sa décapotable en bas de son immeuble. La Chevrolet de Bella se trouvait toujours à son emplacement alors elle supposait que Bella se trouvait à la maison. Elle n'avait pas le courage pour l'affronter maintenant donc elle se décida à aller boire un café. Le soleil commençait à se coucher mais il n'était pas tard. Elle se retrouva donc en terrasse, à boire un café et à tenter de se remettre les idées en place. Jake lui avait parlé des légendes. Il lui avait décrit leurs aptitudes - Dieu qu'elle se sentait idiote de lui avoir proposé de mettre un blouson à présent - et leurs caractéristiques. Il lui avait également raconté le système de l'imprégnation. Elle comprenait désormais pourquoi Sam s'était soudainement entiché d'Emily et avait complètement oublié Leah du jour au lendemain.
Elle ne s'était pas du tout rendue compte du temps où elle était restée assise sur cette terrasse de café à méditer. Seulement lorsqu'elle vit que le soleil n'était déjà plus là, elle se dit qu'il valait mieux qu'elle rentre chez elle.
- "Regardez sur qui je tombe. La miss irritation en personne." Entendit-elle une voie forte, qu'elle n'avait aucun mal à reconnaître. Seigneur. De toutes les personnes dans ce monde, il a fallu que tu mettes cet énergumène sur mon chemin. Elle soupira d'exaspération et leva les yeux vers Emmett Cullen qui avait pris place sur la chaise en face d'elle, arborant un sourire amusé qu'elle avait envie de lui faire ravaler.
- "Qu'est-ce que tu me veux?" Demanda-t-elle avec un regard noir. Il fit mine d'être offensé.
- "Et bah dis donc, c'est comme ça que tu parles à l'homme qui t'a sauvé la vie? Bonjour la gratitude."
Elle esquissa un sourire en secouant la tête. Elle n'osait pas le reconnaître, mais la répartie de cet homme lui avait toujours plu. C'était la première fois qu'elle avait affaire à un homme qui parlait sans réfléchir et qui trouvait toujours quelque chose à dire. La façon dont il s'était défendu l'avait à chaque fois impressionnée.
- "Tu ne réponds pas à ma question." S'entêta-t-elle. Elle se mit à le regarder dans les yeux. Contrairement à tous ceux qu'elle connaissait, Emmett ne baissa pas les yeux et soutint son regard. Il était bien le seul qui ne soit pas intimidé par le fameux « regard perçant de Rosalie ».
- "Je n'ai pas le droit de passer dans le coin par hasard et de venir faire la causette à une amie que je croise sur mon chemin, assise toute seule dans un café?" Demanda-t-il avec un sourire non dissimulé. Rosalie cligna des yeux, pour être sure d'avoir bien entendu.
- "Amis? Depuis quand est-ce qu'on est amis toi et moi? On ne s'est vu que deux fois et crois moi, ça m'a largement suffi."
- "Oh, c'est bizarre, j'aurais cru pourtant. Vu la façon dont tu as pleuré dans mes bras la dernière fois, je pensais qu'on avait franchi un cap important." Dit-il avec une fausse déception. Rosalie grogna doucement. Elle n'aimait pas se rappeler de ce moment de faiblesse. C'est vrai qu'en y repensant, Emmett lui avait été d'un précieux réconfort ce jour là. Elle s'était laissée allée et avait même trouvé ses bras extrêmement protecteurs. Mais il était hors de question qu'il sache cela.
- "Écoute-moi bien. Peut être que dans un passé proche, tu m'as secouru, même sauvé la vie et je t'en suis grée pour ça, mais sache que toi et moi, on est loin d'être amis."
- "Et pourquoi ça?" Demanda-t-il, toujours avec ce sourire.
- "Tu m'horripiles!" Lança-t-elle. Cela provoqua enfin un effet escompté puisque son sourire disparut. Il parut méditant quelques secondes. Puis soudainement, il éclata d'un rire tonitruant, ce qui désarçonna totalement la jeune fille. Il ne peut pas être sérieux, ne serait-ce qu'une minute? Il continuait de rire et elle commençait vraiment à bouillir de l'intérieur.
- "Tu es vraiment un phénomène." Déclara-t-il, après s'être reprit. "Mais je suis persuadé que tu te trompes."
- "Pardon?" Demanda-t-elle.
- "En fait, peut être qu'effectivement, je t'horripile et que je dis tout ce qui me passe par la tête. Mais je pense que c'est justement ça qui te plait chez moi."
Rosalie faillit s'étouffer en entendant ses paroles. Non mais quel toupet celui-là! Comment pouvait-il croire qu'elle appréciait son coté carnassier, je m'en foutiste et horripilant? Bien sur qu'il se trompait. Il avait tout faux sur toute la ligne. Elle le détestait rien que pour toutes ces caractéristiques. Elle détestait sa personnalité, c'était comme ça et pas autrement. Il disait n'importe quoi, des foutaises. Elle ne l'aimait pas pour ça, au contraire il l'insupportait pour ça. Il avait tort et elle le savait.
Mais alors pourquoi est-ce qu'elle éprouve le besoin de se le répéter autant, comme si elle voulait se l'assurer?
- "Tu sais quoi? Tu dis n'importe quoi. Tu es un être insupportable et énervant, imbu de lui-même qui se prend pour le nombril du monde et qui se croit au-dessus de tout. Tu es détestable." Fit-elle, très énervée à présent. Il se mit à rire de nouveau, fier de l'effet qu'il était en train de provoquer chez la blonde.
- "Alors ça y est, Madame montre enfin les crocs. Je pensais pas que ce serait si facile." Elle grogna, se leva de la table et entreprit de s'en aller mais il la suivit. "Eh! Tu t'en vas déjà? T'as pas une petite riposte?" Elle se tourna vers lui sèchement.
- "Je ne veux plus que tu m'adresses la parole, c'est compris? Je sais ce que tu es, t'es pas un être humain, t'as une force et une vitesse incroyable, t'es invincible et apparemment tu vieillis pas. Tu es exactement comme ces braqueurs qui ont tué ces pauvres innocents, vous êtes des monstres. Toi, ta famille, eux… T'es pas un être humain alors je veux plus que tu m'adresses la parole." Répéta-t-elle.
Durant tout le temps où il l'avait écouté, Emmett était resté figé, surpris et inquiet. Comment avait-elle pu savoir tous ces trucs là? Comment osait-elle le comparer lui avec ces trois nomades, ces sans cœurs qui ôtent la vie comme on coupe un arbre? Est-ce que c'était la nouvelle copine d'Edward qui lui en avait parlé?
- "Tu me croyais assez naïve pour ne pas regarder ce que tu faisais à la banque?" Reprit-elle en chuchotant. Il agrandit ses yeux de surprise. "J'ai tout vu. La façon dont tu les as propulsés, la vitesse à laquelle vous vous êtes déplacés, vos conversations codées. J'ai tout vu. Je ne sais pas ce que vous êtes exactement mais je sais que vous êtes dangereux, et je compte bie le découvrir. Et quand ce sera le cas, je vous obligerai à partir loin d'ici, Bella saura réellement à qui elle a affaire et plus jamais elle ne vous adressera la parole. Alors reste loin de moi."
Puis elle se détourna. Emmett se frotta le front.
Non mais dans quelle galère s'étaient-ils fourrés? Déjà, ils auraient dû partir d'ici depuis longtemps. Lorsque l'attaque à la banque s'était déclarée. Mais aucun d'entre eux n'avaient eu envie de partir. Et puis quand la petite brune avait tout découvert sur eux, ils auraient dû faire leurs valises et se volatiliser. Aussi qu'est-ce qu'il lui avait pris à Edward de tomber amoureux? Il avait vraiment mal choisi son moment celui-la. Quand Jasper et lui l'avaient aperçu en train de l'embrasser de façon éhontée, Emmett s'était dit qu'il aurait enfin une occasion de le charrier pour s'être enfilé une humaine, lui qui avait toujours refusé catégoriquement. Mais quand il apprit par Jasper qu'apparemment, c'était beaucoup plus qu'une simple folie - oh combien inattendue! - de la part d'Edward, il s'est dit que ça allait être finalement beaucoup plus compliqué que prévu.
Mais la petite avait facilité la tâche en prenant ses jambes à son cou et en s'enfuyant toute seule. Emmett s'est alors dit qu'ils pourraient partir dès le soir.
C'était sans compter sur Edward qui refusait de s'en aller. Et comme si cela ne suffisait pas, voila que la pile alcaline s'y mettait aussi. Depuis quand est-ce qu'Alice la connaissait? Évidemment, ce cher Jasper qui n'a jamais su dire non à son enquiquineuse a décidé lui aussi de rester. Femmelette. Seul Carlisle était enclin à partir. De toute façon, il est pas net celui-là depuis qu'il est arrivé.
Mais quand il y repensa, Emmett non plus n'avait pas envie de s'en aller d'ici. La vérité est que cette blonde tape à l'œil, chieuse et butée le faisait beaucoup rire. Il aimait bien la provoquer car avec elle, il pouvait être sûr qu'elle démarrerait au quart de tour. Mais il ne pouvait pas la laisser s'en aller comme ça après cette confrontation. Elle en savait trop. Beaucoup trop. D'ailleurs, Emmett avait senti comme une odeur bizarre et nauséabonde émanant d'elle. Contrastant fortement avec son odeur délicieuse habituelle. Elle était allée sur le territoire des clébards.
Qu'était-elle allée foutre là-bas? Elle les connaissait? Il fallait qu'il sache. Il fallait qu'il arrête cette fille avant qu'elle ne fasse quoi que ce soit d'irréfléchi. Il la suivit de près pendant quelques instants et profitant qu'il n'y avait personne dans les alentours, en profita pour agripper son bras doucement, de la retourner et de la plaquer - avec toute la douceur qu'il pouvait - contre le mur longeant le trottoir. Elle allait crier de surprise mais il mit sa main contre sa bouche pour l'empêcher de se faire entendre. Les yeux de Rosalie étaient affolés.
- "Calme-toi." Lui dit-il. "Je voulais simplement parler." Il relâcha sa bouche et elle toussota avant de lui jeter un regard empli de prudence.
- "Lâche-moi, je n'ai rien à te dire."
- "Comment tu connais les Quileutes?" Lança-t-il d'un coup sec. Elle s'immobilisa.
- "Comment est-ce que…"
- "Réponds à ma question." La coupa-t-il. Sa colère s'amplifia.
- "Je n'ai aucun compte à te rendre. Je suis assez grande pour choisir mes fréquentations, il me semble." Emmett perdit patience. Il approcha son visage de celui de la blonde et prit un air à la fois sérieux et calme.
- "Maintenant tu vas m'écouter attentivement. Tu vas rentrer chez toi et arrêter de penser à tout ça, parce que sinon, il se pourrait que tu risques d'avoir des ennuis, de très gros ennuis même. Et je t'ai déjà sauvé la vie une fois, j'ai pas envie de recommencer. Je ne te demande pas la lune, simplement de me croire quand je te dis qu'il n'est pas bon pour toi de te mêler de choses qui ne te concernent en rien et dont tu ne sais absolument rien. Rentre chez toi et abandonne tes suspicions et ton entêtement."
- "Ou sinon quoi?" Demanda-t-elle doucement avec empathie et sarcasme. Il inspira.
- "Sinon, je vais devoir t'en empêcher."
- "Et comment tu vas m'en empêcher, hein? Comment comptes-tu me faire tai…" Elle n'eut même pas le temps de finir sa phrase qu'il l'avait fait taire en l'embrassant.
Il ne savait même pas pourquoi il avait fait ça. Il en avait simplement eu envie, une pulsion qu'il n'avait pas su retenir. Il attendait le moment où elle le repousserait avec violence. Il ne l'en empêcherait pas. Mais à son plus grand étonnement, Rosalie n'en fit rien. Elle y répondit même, pour la simple et unique raison que ses lèvres étaient trop délicieuses pour pouvoir être repoussées. Elle bougea ses lèvres lentement et resta immobile. Elle était une statue - non pas qu'elle ait les moyens de bouger, vu qu'elle était entre un mur et lui, avec ses bras musclés qui la maintenaient en place.
Petit à petit, elle se rendit compte qu'elle n'était plus prisonnière puisque les mains d'Emmett étaient maintenant posées sur son visage. Elle pouvait dès à présent s'écarter et lui asséner une bonne claque qui ne lui ferait sûrement aucun effet.
Mais pourquoi est-ce qu'elle ne le fit pas? Pourquoi continuait-elle à se laisser faire? Elle devrait se stopper maintenant, s'arrêter avant que ce baiser ait un moindre impacte sur ses convictions et ses idées.
Emmett qui commençait à en désirer plus, se recula d'un coup. Il lâcha le visage de Rosalie et laissa un espace suffisant pour avoir de nouveau les idées claires. Rosalie quant à elle était liquéfiée. Elle n'avait strictement aucune idée de ce qui venait de se produire. Pourtant elle savait ce qui lui restait à faire. Elle avait simplement moins de cœur à l'ouvrage qu'à l'accoutumé face à un Emmett qui la fixait intensément, comme s'il était perdu lui aussi. Elle reprit contenance et tenta d'arborer un visage glacial.
- "Ne m'approche plus jamais." Dit-elle avant de s'en s'enfuir rapidement. Emmett resta quelques instant immobile. Mais pourquoi fallait-il que cette fille complique toujours tout?
Rosalie marchait rapidement, ne sentant pas les larmes qui s'écoulaient lentement sur son beau visage. Elle ne voulait plus penser à rien. Trop. C'était trop pour un seul weekend. Elle voulait s'enterrer dans un lit et n'en ressortir que dans plusieurs jours, des semaines, voir des mois s'il le fallait. Mais plus elle se rapprochait de la maison et plus elle prenait conscience de ce dont elle avait vraiment besoin. Bella.
Elle voulait Bella. Elle avait besoin de son amie, quel que soit la situation actuelle. Elle ferait n'importe quoi pour que Bella lui parle et soit avec elle ici et maintenant. Peu importe ce qu'elle devra lui dire ou faire pour se faire pardonner, elle s'en fichait. Elle pourrait même dire que les Cullen étaient des saints si c'est-ce qu'il fallait pour qu'elle retrouve enfin Bella.
Elle arriva rapidement en bas de son immeuble mais remarqua une Volvo grise, garée. Étrange car elle avait l'impression de l'avoir déjà vu quelque part, mais n'arrivait pas à se rappeler où et quand. Elle monta les marches doucement, toujours les larmes coulantes et ouvrit la porte. Elle fit quelques pas dans l'appartement apparemment vide avant d'aller dans la cuisine où elle vit une assiette dans l'évier. Bella était donc ici. Ni une ni deux, elle se précipita vers la chambre de son amie et l'ouvrit à la voler en scindant son prénom.
- "Bella!!"
Rosalie écarquilla les yeux d'horreurs devant la scène qui se déroulait sous ses yeux. Bella était allongée sur le lit en soutien gorge, Edward Cullen au-dessus d'elle avec la chemise ouverte.
Elle comprit instantanément à qui appartenait cette Volvo et où elle l'avait aperçu. C'était au poste de police, quand il avait accompagné Bella. En les voyant tous les deux qui avaient tourné la tête vers elle, elle se sentit mal. Comment avait-elle pu espérer recoller les morceaux avec Bella ce soir, alors que celle-ci n'en avait plus rien à faire puisqu'elle était trop occupée à s'abandonner?
Non, apparemment Rosalie s'était trompée, Bella ne pourrait rien faire pour l'aider.
- "Excusez-moi… Euh… Je suis désolée." Dit-elle confuse avant de refermer la porte violemment.
Comment tout cela avait-il bien pu arriver?
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